Européen convaincu, le projet d'une constitution européenne est pour moi une étape logique dans un processus qui doit mener à terme les Européens de l'Union à se sentir Européens avant de se sentir Français, Allemand, etc...

C'est donc d'un bon oeil que je voyais ce projet de constitution arriver à terme. Malheureusement, force est de constater que certains points me semblent innacceptables, et par conséquent, je n'approuverai pas ce texte lors du référendum.

Avant d'expliquer mon choix, je vous présente d'abord mon idéal de l'europe. Sur le plan de la vie quotidienne, une bonne protection sociale, tant au niveau de l'emploi que de la santé, des services publics de qualités -tant au niveau de l'efficacité que de la relation avec les usagers- et sanctuaires de la laïcité. Sur le plan politique, la limitation des souverainetés nationales, qui donnent surtout une image de querelles de clochers, un parlement européen fort et démocratiquement élu, et une commission affaiblie, car moins représentative d'un point de vue démocratique.

Le texte de la constitution répond à certains de ces idéaux, mais en élude d'autres ou les contrevient.

Article I-3-2 + Article I-4-2 = "Directive Bolkestein" ?

Article I-3-2
L'Union offre à ses citoyens un espace de liberté, de sécurité et de justice sans frontières intérieures, et un marché intérieur où la concurrence est libre et non faussée.
Article I-4-2
Dans le champ d'application de la Constitution, et sans préjudice de ses dispositions particulières, toute discrimination exercée en raison de la nationalité est interdite.

Ces deux articles, pris séparéments, sont prometteurs. Malheureusement (ou heureusement) la directive "Bolkestein" sur les services, et en particulier le "principe du pays d'origine" a montré un tout autre but : le dumping social, fiscal et règlementaire. En fait, il manque ici une définition précise de ce qu'est une concurrence "non faussée", définition qui tienne compte des réalité économiques et sociales de chaque membres de l'Union.

Article II-70-1

Article II-70-1
Toute personne a droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion. Ce droit implique la liberté de changer de religion ou de conviction, ainsi que la liberté de manifester sa religion ou sa conviction individuellement ou collectivement, en public ou en privé, par le culte, l'enseignement, les pratiques et l'accomplissement des rites.

Le problème que me pose cet article, c'est qu'un agent du service public serait libre de manifester sa religion, et donc représente à la fois sa religion et l'état/l'Union Européenne, ce qui contrevient à ma conception de la séparation des églises et de l'état/l'Union Européenne. Là aussi il manque une "sanctuarisation" de la laïcité qui est, à mon sens, le garant de la liberté de religion et de culte.

Une précision importante, en mettant en parallèle la loi française contre les signes religieux à l'école. Je ne m'interesse ici qu'aux agents de la fonction public (dont les professeurs et le personnel d'encadrement), pas aux usagers (les élèves et les parents d'élèves), qui eux ont et doivent avoir cette liberté.

Article II-96

Article II-96 : Accès aux services d'intérêt économique général
L'Union reconnaît et respecte l'accès aux services d'intérêt économique général tel qu'il est prévu par les législations et pratiques nationales, conformément à la Constitution, afin de promouvoir la cohésion sociale et territoriale de l'Union.

Il s'agit ici de la négation du service public pur et simple. Sinon, pourquoi ne pas avoir utilisé le terme "service public" ? En le mettant en parallèle avec la directive "Bolkestein", on pourrait se demander si ce n'est pas la plannification du dépeçage du service public. En effet, le service public fournit des services "d'intérêt économique général", mais ces services peuvent aussi être assurés par des prestataires privés. Sans oublier la possibilité de privatiser les services publics (France Télécom dans le passé, bientôt EDF et GDF).

Autrement dit, la présence d'un service public implique la présence de "services d'intérêt économique général", mais la présence de "services d'intérêt économique général" n'implique pas nécessairement la présence d'un service public.

Conclusion

Les quelques articles qui ont attirés mon attention m'incitent à penser que malgré les idéaux affichés, le texte de la constitution européenne qui nous est proposée porte les germes de l'échec social de l'Europe, ce que je n'accepte pas. Je préfère donc risquer l'échec politique : je voterai "NON" à la constitution européenne qu'on nous propose.

C'est dommage, car par ailleurs ce projet comportait de réelles avancées. Mais la note est éliminatoire.